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Pourquoi Verdun

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C’est à Verdun que la guerre entre véritablement dans sa nouvelle dimension ;  celle du feu après celle de la masse acquise à l’époque napoléonienne ; elle devient industrielle en mobilisant tous les moyens de la production, de la technique, de la science et de l’innovation. On estime que 60 millions d’obus auraient été tirés durant les dix mois de la bataille par les canons allemands, ce qui amène à la statistique macabre qu’il aurait fallu 375 obus  pour tuer un homme !
Une bataille extrême par la durée, la dimension, la violence qu’elle a revêtues.   
Pour l’Allemagne, c’est un échec, le deuxième après celui de la Marne, mais pas pour autant une véritable défaite ; elle ne conduira pas à un changement radical de rapport de forces, elle  n’aura finalement aucune répercussion stratégique pour la suite du conflit.
Elle ancre un peu plus la guerre dans une logique de montée aux extrêmes, ne serait-ce  que par les moyens qu’il faudra désormais engager d’un côté comme de l’autre pour anéantir l’adversaire.
Les épisodes suivants montreront cependant que cet objectif ne pourra pas être atteint et plus les moyens mis en œuvre seront importants et innovants, plus, tel un mirage, il restera hors d’atteinte.

UNE STRATÉGIE POLITIQUE PLUS QUE MILITAIRE

Verdun démontre qu’une offensive, quand elle ne peut pas s’affirmer dans sa phase initiale, est vouée à donner toutes ses chances à l’adversaire qu’elle aura placé dans une position  défensive. La défense donnant finalement l’avantage à celui qui y est condamné, comme l’affirme Clausewitz.
La force symbolique de Verdun a comblé le vide d’une dimension stratégique qu’elle n’a jamais eue, ni pour ses attaquants, ni pour ses défenseurs. A preuve pour ces derniers que l’état-major français en avait négligé la défense et avait, avant même 1916, envisagé d’abandonner la place dans le souci logique de raccourcir la ligne de front pour économiser ses moyens.
S’accrocher à Verdun a été finalement une décision que les politiques ont imposé aux militaires, une ingérence du politique dans l’art de la guerre.

La dimension symbolique reste surtout du côté français, beaucoup moindre du côté allemand. L’explication en paraît assez simple : pour l’armée allemande, il s’agit d’une défaite, du moins un échec patent, plus largement un épisode parmi d’autres d’une guerre qui a été occultée par celle qui l’a suivie. Les horreurs et les conséquences de la Seconde Guerre ont été pour l’Allemagne sans commune mesure avec celles de la Première.
Finalement, il semble que ce sont les Français qui ont entraîné les Allemands dans cette épopée mémorielle. A l’ossuaire de Douaumont, côte à côte, sont inhumés près de 45% des morts des deux camps dans une sorte de fraternisation éternelle.
La main du président François Mitterrand dans celle du chancelier Helmut Kohl lors de la cérémonie commémorative  du 22 septembre 1984 à l’ossuaire de Douaumont est comme la mise d’un point final mis à une longue histoire ; une affirmation  solennelle de la vacuité de la confrontation face à la fécondité de la coopération.

Par le sang versé, Verdun est comme l’immense et ultime holocauste consommant une désunion séculaire mais paradoxalement les prémices de l’acte fondateur d’une réconciliation qu’il faut vouloir définitive.


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