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Un notable empoisonneur

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Sept jours de débats aux Assises de Montpellier en juin 1931 ne parviennent pas en dépit des présomptions accablantes qui pèsent sur l’accusé, à prouver avec certitude la culpabilité du docteur Laget. Au nombre des journalistes, qui couvrent ce procès à grand spectacle, certains y voient un dossier de convictions plus que de preuves.  Cela n’empêche pas les jurés et la cour, très impressionnés par les témoignages pathétiques de la mère et la sœur de l’accusé, de condamner Pierre Laget à la guillotine.  
Pourtant, le verdict de sang effraye les plus hautes instances de l’État. N’y a-t-il pas un doute ? Si minime soit-il, on ne peut laisser « la justice suivre son cours » - formulation redoutable à l’époque qui signifie la mise à mort du condamné. Le président de la République Paul Doumer, fraîchement élu, décide d’user de son pouvoir régalien en commuant la peine capitale en travaux forcés à perpétuité.

Le praticien déchu embarque en septembre 1933 sur le navire-prison « Martinière ». A son arrivée, le matricule 51437 est détenu aux îles du Salut, au large de Kourou, en Guyane française. L’archipel, cerné par l’océan et ses forts courants marins, décourage les tentatives d’évasion. Le forçat Laget ne semble pas avoir eu cette velléité.  Il exerce tout au long de sa détention les fonctions d’infirmier à l’hôpital de la transportation de l’île Royale. En 1938, une mesure de clémence le relève de sa peine des travaux forcés à perpétuité qui est ramenée à vingt ans. Oublié de tous, il meurt sur son lieu d’expiation le 1er septembre 1944.
Avant de partir pour l’éternité anonyme, le bagnard prend le soin de crayonner quelques mots en guise d’adieu : «  C’est volontairement que je me tue, non pour me faire justice mais parce que j’en ai assez. Inutile de chercher, si je vis encore quand on me trouvera, de me soigner. Avec ce que j’ai pris, ce n’est qu’une question de minutes pour que la mort soit là, rien n’y fera. Adieu à tous et je pardonne. »
Le docteur Laget est parti avec son secret.

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